La clef des songes ou dialogue avec le Bon Dieu par Alexandre Grothendieck

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La clef des songes ou dialogue avec le Bon Dieu par Alexandre Grothendieck

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Encore une personne gnostique dans l'âme.

https://grothendieck.umontpellier.fr/
Alexandre Grothendieck (1928-2014) est considéré par ses pairs comme l’un des plus grands mathématiciens du XXème siècle. Son apport fondamental réside dans la refonte de la géométrie algébrique.
...
Naturalisé français en 1971, le mathématicien intègre le corps enseignant de l’Université des Sciences et Techniques du Languedoc à Montpellier en 1973. Parallèlement à sa vie d’universitaire, il s’investit dans les courants de retour à la terre et de vie communautaire.

En 1977, Alexandre Grothendieck obtient la médaille Émile Picard décernée par l’Académie des sciences. L’année suivante, il écope de six mois de prison avec sursis pour avoir hébergé, en 1975, un moine bouddhiste japonais dont le titre de séjour avait expiré.

Il laisse un témoignage de son parcours avec Récoltes et Semailles : réflexions et témoignage sur un passé de mathématicien (1983-1986), dans lequel il n’hésite pas à pointer du doigt certains mathématiciens de renom. Dans La Clef des Songes ou dialogue avec le bon Dieu (1987) et d’autres textes littéraires comme Éloge de l’Inceste[3] (1979) ou Développements sur la lettre de la Bonne Nouvelle (1990), il mêle sciences, métaphysique, mysticisme et religions, proposant une vision globale du monde.

Dès le début, son livre est remarquable :

I. TOUS LES RÊVES SONT UNE CRÉATION DU RÊVEUR
1. Premières retrouvailles - ou le rêve et la connaissance de soi.

(30 avril 1987) Le premier rêve dans ma vie dont j’ai sondé et entendu le message a aussitôt
transformé le cours de ma vie, profondément. Ce moment a été vécu, véritablement,
comme un renouvellement profond, comme une nouvelle naissance. Avec le recul, je dirais
maintenant que c’était le moment des retrouvailles avec mon “âme”, dont je vivais séparé
depuis les jours noyés d’oubli de ma première enfance. Jusqu’à ce moment-là j’avais vécu
dans l’ignorance que j’avais une “âme”, qu’il y avait en moi un autre moi-même, silencieux
et quasi invisible, et pourtant vivant et vigoureux - quelqu’un bien différent de celui en moi
qui constamment prenait le devant de la scène, le seul que je voyais et auquel je continuais à
m’identifier bon gré malgré : “le Patron”, le “moi”. Celui que je ne connaissais que trop, à
satiété. Mais ce jour-là a été un jour de retrouvailles avec l’Autre, crû mort et enterré “une
longue vie durant” - avec l’enfant en moi.

Les dix années qui se sont écoulées depuis lors m’apparaissent maintenant, surtout,
comme une suite de périodes d’apprentissage, se concrétisant par le franchissement de
“seuils” successifs dans mon itinéraire spirituel. C’étaient des périodes de recueillement et
d’écoute intense, où je faisais connaissance avec moi-même, tant avec “le Patron”, qu’avec
“l’Autre”. Car mûrir spirituellement, ce n’est ni plus, ni moins, que faire et refaire connais-
sance de soi-même ; c’est progresser peu ou prou dans cette connaissance sans fin. C’est
apprendre, et avant tout : s’apprendre soi-même. Et c’est aussi : se renouveler, c’est mourir
tant soit peu, se séparer d’un poids mort, d’une inertie, d’un morceau du “vieil homme” en
nous - et renaître !

Sans connaissance de soi, il n’est pas de compréhension d’autrui, ni du monde des
hommes, ni des oeuvres de Dieu en l’homme. Encore et encore j’ai eu à constater, chez
moi-même, chez mes amis ou proches, comme aussi dans ce qu’on appelle les “oeuvres de
l’esprit” (y compris parmi les plus prestigieuses) : sans connaissance de soi, l’image que nous
nous faisons du monde et d’autrui n’est que l’oeuvre aveugle et inerte de nos fringales, nos
espoirs, nos peurs, nos frustrations, nos ignorances délibérées et nos fuites et nos démissions
et toutes nos pulsions de violence refoulée, et l’oeuvre des consensus et des opinions qui font
loi autour de nous et qui nous taillent à leur mesure. Elle n’est guère que des rapports loin-
tains, indirects et tortueux avec la réalité dont elle prétend rendre compte, et qu’elle défigure
sans vergogne. Elle est comme un témoin mi-imbécile, mi-véreux dans une affaire qui le con-
cerne de plus près qu’il ne veut bien l’admettre, sas se douter que son témoignage l’engage et
le juge...

Quand je passe en revue ces grandes étapes de mon cheminement intérieur, tout au cours
des dix années écoulées, je constate que chacune d’elles a été préparée rêves. L’histoire de
ma maturation vers une connaissance de moi-même et vers une compréhension de l’âme
humaine se confond, à peu de choses près, avec l’histoire de mon expérience du rêve. Pour le
dire autrement : la connaissance à laquelle je suis parvenu sur ma propre personne et sur la
psyché en général, se confond quasiment avec mon expérience du rêve, et avec la connaissance
du rêve qui en est un des fruits.

Ce n’est pas là l’effet d’un hasard, certes. J’ai fini par apprendre, à mon corps défendant,
que la vie profonde de la psyché est inaccessible au regard conscient, si intrépide, si avide de
connaître soit-il. Réduit à ses propres moyens, et même secondé par un travail de réflexion
serré et opiniâtre (parce que j’appelle le “travail de méditation”), ce regard ne pénètre guère
au delà des couches les plus superficielles. A présent, je doute qu’il y ait, ou qu’il y ait eu
homme au monde (fut-il Bouddha en personne) chez qui il en soit différent - chez qui l’était
et l’activité des couches profondes de la psyché soit accessible directement à la connaissance
conscient. Un tel homme ne serait-il pas, quasiment, égal à Dieu ? Je n’ai eu connaissance
d’aucun témoignage qui puisse faire supposer qu’une faculté aussi prodigieuse ait jamais été
dévolue à une personne.

Il est vrai que tout ce qui se trouve et ce qui se meut dans la psyché cherche et trouve
une expression visible. Celle-ci peut se manifester au niveau du champ de la conscience (par
des pensées, sentiments, attitudes etc), ou celui des actes et des comportements, ou enfin au
niveau (dit “psychosomatique” en jargon savant) du corps et des fonctions du corps. Mais
toutes ces manifestations, psychiques, sociales, corporelles sont à tel point occultes, à tel
point détournées, qu’il semble bien qu’il faille, là encore, une perspicacité et une capacité
intuitive surhumaines, pour parvenir à un extraire un récit tant soit peu nuancé des forces et
des conflits inconscients qui s’expriment à travers elles. Le rêve, par contre, se révèle comme
un témoignage direct, parfaitement fidèle et d’une finesse incomparable, e la vie profonde de
la psyché. Derrière des apparences souvent déconcertantes et toujours énigmatiques, chaque
rêve constitue en lui-même un véritable tableau, tracé de main de maître, avec son éclairage
et sa perspective propres, une intention (toujours bienveillante), un message (souvent percutant).

2. Découverte du Rêveur.

Nous-mêmes sommes aveugles, autant dire, nous n’y voyons goutte dans cet embrouillamini
de forces agissant en nous et qui, pourtant, gouvernent inexorablement nos vies (aussi
longtemps, tout au moins, que nous ne faisons l’effort d’en prendre connaissance...). Nous
sommes aveugles, oui - mais il y a en nous un œil qui voit, et une Main qui peint ce qui est
vu. Le silence assoupi du sommeil et de la nuit lui servent de toile, nous-mêmes sommes sa
palette ; et les sensations, les sentiments, les pensées qui nous traversent en rêvant, et les pulsions
et les forces qui agitent nos veilles, voilà Ses tubes de peinture, pour brosser ce tableau
vivant qu’Elle seule sait brosser. Un tableau-parabole, oui, campé à la volée ou savamment
composé, farce ou élégie et parfois drame inexorable et poignant...- gracieusement offert à
notre attention ! À nous de le déchiffrer et d’en prendre de la graine, s’il nous chaut. À
prendre ou à laisser !

Et presque à tous les coups, certes, on “laisse”. Même parmi ceux qui se piquent aujourd’hui
(suivant une mode récente et de bon aloi) de “s’intéresser aux rêves”, en est-il un
seul ou une seule qui ait pris le risque d’aller jusqu’au fond d’un seul de leurs rêves - d’aller
jusqu’au fond, et “d’en prendre de la graine” ?

Ce livre, que je commence à écrire aujourd’hui-même, s’adresse en tout premier lieu aux
très rares (s’il s’en trouve à part moi) qui osent aller au fond de certains de leurs rêves. À
ceux qui osent croire à leurs rêves et aux messages qu’ils leur portent. Si tu es un de ceux-là,
je voudrais que ce livre te soit un encouragement, si besoin est, pour avoir foi en tes rêves.
Et aussi, à avoir foi (comme j’ai eu foi) en ton aptitude à entendre leur message. (Et à voir se
lézarder une à une et s’effondrer tes convictions les mieux assises, à voir ta vie se transformer
sous tes yeux...).

Peut-être aussi la connaissance du rêve que j’essaye de communiquer pourra-t-elle t’éviter
certains des tâtonnements et des détours par lesquels j’ai eu à passer, dans mon voyage à la
découverte de moi-même. Sans que je m’en doute, ce voyage allait devenir aussi celui de la
découverte du Rêveur - de ce Peintre - Metteur-en-Scène bienveillant et malicieux, au regard
pénétrant et aux moyens prodigieux, cet Œil et cette Main dont je viens de parler.
Dès le premier rêve que j’ai scruté, me révélant à moi-même en un moment de crise
profonde, je sentais bien que ce rêve ne venait pas de moi. Que c’était un don inespéré,
prodigieux, un don de Vie, qu’un plus grand que moi me faisait. Et j’ai compris peu à peu
que c’est Lui et nul autre qui “fait”, qui crée chacun de ces rêves que nous vivons, nous,
acteurs dociles entre ses mains délicates et puissantes. Nous-mêmes y faisons figure de “rêvants”,
voire de “rêvés” - créés dans et par ce rêve que nous sommes en train d’accomplir,
animés par un souffle qui ne vient pas de nous.

Qu’on me demande aujourd’hui, au sujet de mon travail sur les rêves, quel en est le fruit
qui a pour moi le plus de prix, je répondrai sans hésiter : c’est de m’avoir permis de rencontrer
le Maître du Rêve. En scrutant Ses œuvres, j’ai appris peu à peu à Le connaître tant soit peu,
Lui à qui rien en moi n’est caché. Et tout dernièrement, comme aboutissement, sûrement,
d’une longue quête qui s’ignorait elle-même, j’ai appris enfin à Le connaître par son nom.
Peut-être en sera-t-il de même pour toi. Peut-être tes rêves aux mille visages te feront-ils
trouver, toi aussi, Celui qui te parle par eux. L’Un, l’Unique.
Si ce livre peut t’y aider tant soit peu, il n’aura pas été écrit en vain.
Modifié en dernier par PetitHommeLibre le 6 octobre 2023, 12:18, modifié 2 fois.
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Modifié en dernier par PetitHommeLibre le 6 octobre 2023, 12:50, modifié 1 fois.
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